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Voici ce qui nous attend pour le mois à venir, le joli mois de l'eurofoot.
A Zurich, l'UEFA fait dresser des murs de brique devant les bistrots qui se refusent à ne vendre qu'une seule marque de bière, sponsor de l'euro.
Les sourires sont les mystères de la vie, aussi habiles à dissimuler qu'à révéler.
Et sublime folie du regard: tu sais et tu vois le mensonge et pourtant, un instant, tu bandes?
Aies confiance dans celui qui ne sourit pas.
Les formes visuelles ne fonctionnent-elles pas comme des drogues ?
Certains prennent de la cocaïne pour avoir l'air plus brillants dans la vie, d'autres se shootent à l'héroïne pour ressentir la réalité moins durement. On peut préférer l'acide pour se projeter dans des fantaisies fantastiques, ou le crack pour arriver à être méchant, ou encore?
Et la symétrie, que déclenche-t-elle en toi ?
Sentiment d'équilibre ? Sérénité à la contemplation d'un monde bien fait ? Refus du chaos ?
Volonté de maîtrise ? Idée de la perfection ? Beauté ?
Dans le fond nous choisissons subconsciemment certaines drogues afin de déclencher les effets que nous avons expérimentés et que nous savons nous aider à vivre, à accepter la réalité.
Chers amis photographes, vous shootez-vous à la symétrie ?
La symétrie est-elle une drogue à la mode ?
J'adorerais entendre vos réponses à ces troublantes questions?
(photographie prise il y a une vingtaine d'années au Cloître de Hauterive, plan selon le conseil attentionné du père supérieur qui trouvait que c'était "la plus belle vue" sur le cloître)
Un sourire complice me monte aux yeux à chaque fois que je redécouvre la puissance érotique avec laquelle la nature sait intégrer la blessure, la maladie, la mort, dans une création toujours renouvelée de sens, de rire et de beauté.
"Sois simplement là, accepte ta laideur et ta faiblesse", me disait mon chat un soir d'été peu avant de mourir, " et jouis de ta décomposition, comme la feuille mourante, somptueuse en son marais, offrant ses fibres attendries par l'âge aux mille microscopiques bouches de la nature, avec leurs petites dents caressantes?"
Cultivé, mon chat, non ?
Il avait bien raison, et je comprends chaque jour mieux que cet érotisme à la vie à la mort est le plus bandant des projets et le plus riche des destins
un paysan travaillant son champ, sous la pluie qui ruine sa récolte
[rapport de la caméra 4672, 8 mai, 13h32:27, backup en 2 exemplaires, copie à l'administration fédérale]
? ou prolétaires en mal de caviar, chacun fait sa putain pour la Migros, et se retrouve au fond d'un recoin bétonné verdâtre, affublé d'un numéro de produit, comme n'importe quelle culotte ou carotte se vendant au plus offrant?
Mon sublime et bandant menu "Renforcement-Accentuation" ! Photoshop, la prostitution mise au service du grand public? L'éjaculation précoce?
Et toujours à proximité un publicitaire pour faire vroum-vroum avec le champignon technologique, toujours la solution la plus glauque, se vautrer dans la facilité, voler et dégrader l'invention et la pensée de de ceux qui ont encore les yeux réceptifs et fragiles?
Inénarrable, le goût de la pemme-de-terre, blanche ou un peu jaune, avec ou sans la peau, ce goût qui se cache sous une forme informe !
Les formes toujours renouvelées, originales ou obéissant à des modes, de l'érotisme public me fascinent. Le sommet du sexy sympathique pour un journal de télévision semble donc être l'archétype mythique du "chou-fleur sous plastic".
Pas étonnant quand la Migros se donne pour mission de guider l'érotisme suisse?
Et pourtant il ne te manque pas grand chose, pauvre petite fille médiatique, pour accéder à un érotisme réel: une belle cicatrice sur ta joue, une petite dent de travers, une peau plus vraie, un oeil légèrement décalé? Alors tu existerais, tu serais réelle. Là tu n'es qu'une image vide de sens, sans odeur et sans goût.
Pas comme cette petite bassiste boîteuse qui jouait il y a quelques jours à Artamis: forte, profonde, musicienne, dure parfois, donc érotique.
Vous me direz, amis, collègues et visiteurs de uneparjour, mais pourquoi donc nous emmerdes-tu avec tes crachats dans notre soupe médiatique quotidienne, pourquoi ne nous laisses-tu pas consommer en paix ? Eh bien? je crois que si, pour un million de message quotidien mythifiant l'érotisme du chou-fleur, quelque minuscule petite voix se fait soudain entendre, cela a peut-être un sens de la laisser vivre.
Et je rendrais également un hommage, avec une douleur certaine au fond de ma poitrine, au millions de petites filles, jolies, vraies, naturelles, qui ont eu honte d'elles-mêmes sous le matraquage quasi militaire de la saloperie hollywoodienne.
Mais ne vous gênez pas pour me dire votre fatigue ! Allez un email à cet emmerdeur !