GE
â¦dans la seule librairie de la ville, tiraillé par un impérieux besoin :
-Bonjour Madame, le rayon poésie, s'il vous plaît ?
-Poésie ? Mais rienâ¦enfin presque. Quelques livres que je m'apprête à retourner, ils sont là-bas, derrière le pilier.
Et derrière le pilier, sur le sol, écrasés par des livres de cuisines et de bricolages, une dizaine de poètes en poche, dans un carton, attendent d'être réexpédiés chez Gallimard. Je sauve Marina Tsvétaïva de cet affront.
Rafale, rafale
Aux mille pétales,
Aux mille coupoles,
Rafales-la-folle !
Toi une, toi foule,
Toi mille, toi râle,
Rafale-la-Saoule
Rafale-la-Pâle (â¦)
Et fouaille les cendres de ses mots à la recherche de braises. Mais rien. Rien que je comprenne et me touche. Rien qui soit commun à nos mondes sinon ce Moi-Je, siège de toutes les douleurs où viennent gémir les tempêtes de l'Epoque.
Merde, je vais laisser les mots dans les livres, pour aller me promener et me saouler de l'odeur des pins mouillésâ¦
[Francis Traunig]