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Mon ami affectueux, pourquoi ne laisserais-tu pas la folie du monde briser ton c?ur en morceaux?
Ne tentons pas de nous protéger et laissons-nous vraiment détruire par cette folie!
Attendons de voir ce qu'il reste de nous après cette mort.
Et alors, oui, après avoir déjà traversé cette mort, battons-nous! Peut-être, mon ami affectueux, aurons-nous dépassé cette paralysie qui nous efface et nous fait honte.
Peut-être aurons-nous retrouvé la force et le courage.
... en toute liberté d'après CJ...
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Et si nous écoutions nos corps, mon ami affectueux! Les poumons ne vont-ils pas continuer à se remplir d'air? Les veines ne continueront-elles pas à laisser courir le sang? La lumière de l'aube n'arrivera-t-elle pas à se frayer un chemin jusqu'à nos yeux en se glissant sous nos paupières fermées par le cauchemar?
Peut-être que lentement nous allons sentir notre force nous revenir. Peut-être que doucement notre corps se mettra à remuer. Peut-être même que nous aurons envie de secouer nos muscles. Et peut-être qu'alors, mais seulement quand nous serons prêts, nous allons nous remettre assis.
Et ensuite nous dresser debout sur nos pieds.
Et retourner au combat.
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Peut-être que si nous renonçons à contenir la souffrance de nos c?urs, plutôt que d'imaginer que nous ne pourrions pas survivre les yeux ouverts à cela, alors peut-être pourrons-nous constater que nous ne sommes tout de même pas complètement morts.
Peut-être que cet ouragan de la douleur, quand nous lui aurons permis de tout ravager en nous et que nous aurons gardé les yeux ouverts face à cette destruction, peut-être que quelque chose va pourtant continuer. Que quelque chose va commencer de remuer.
Ne tentons pas de nous protéger et laissons-nous vraiment détruire par cette folie!
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Mon ami affectueux, nous ne sommes pas des soldats. Nous ne sommes pas des tueurs. Nos c?urs, pas plus que nos corps, ne sont faits pour se carapacer.
Alors laissons la barbarie du monde nous réduire en pièces, nous effriter et nous disperser comme de la poussière dans le vent.
Se soumettre entièrement à l'angoisse, mon ami affectueux! Laisser toutes ces choses nous déchirer et nous égorger!
Ne tentons pas de nous protéger et laissons-nous vraiment détruire par cette folie!
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Pourquoi ne sanglotons-nous pas à la vue de ces corps, à Gaza ou ailleurs, démembrés ou décharnés?
Pourquoi n'insultons-nous pas et ne frappons-nous pas les visages moqueurs et menteurs de leurs tourmenteurs?
Pourquoi ne tremblons-nous pas de tout notre corps devant les plantes et devant toutes les vies sauvages qui ne savent plus comment respirer? Et pourquoi ne hurlons-nous pas devant les âmes recuites d'ambition et de froideur qui excitent encore la course folle de ce cataclysme?
Et si nous laissions tout cela nous pénétrer au plus profond de nos corps, et si nous laissions ouvertes les portes et les fenêtres de nos âmes?
Ne tentons pas de nous protéger et laissons-nous vraiment détruire par cette folie!
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À mon ami affectueux
Pourquoi ne laisserais-tu pas la folie du monde briser ton c?ur en morceaux, mon ami affectueux?
Pourquoi ne pas nous serrer dans les bras, pourquoi ne pas nous effondrer en larmes et tomber par terre?
Et si nous laissions tout cela nous pénétrer au plus profond de nos corps, et si nous laissions ouvertes les portes et les fenêtres de nos âmes?
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