GE
le jour se lève, l'ouvrier s'en va travailler sur sa moto, la femme vaque dans sa cuisine...
je pourrais être Dieu...
et interdire au jour de revenir, faire glisser le pneu de la moto sur la falque d'huile, et lever la jupe de la ménagère...
Se souvenir
Du mois de Novembre
Et des pleurs de Méduse
Sous le corps de Poséidon
En lui prenant sa main
Elle fit apparaitre
La petite fille
Qui rêvait de grand large
Vestiges sauvés des Eaux
Captifs dans l'espace blanc
J'ai à l'œil tout un Zoo
Silence.
Des ombres disparues
Promènent partout leur pauvre présence
leur secrète palmodie
M'emporte.
LES VOYAGES
je suis heureux de vivre en belge | les rues sont pleines de corps | qui vaquent sans affirmer rien de spécial sur ce qu'ils sont
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chez les peuples brillants je sens | que tout le stock de beauté des individus_des corps_des âmes | est jeté vers la surface | vers les autres vers la foule | et qu'il n'en reste plus des tonnes pour l'intérieur secret | ici les corps sont là_au travail_au bistrot_à l'ennui_à la douleur | sans cacher l'insignifiance_la bêtise
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alors il y a un érotisme caché_profond à ce théâtre_cette banalité | leur présence ne te répète pas sans cesse que tu es _moins bien que_ et les corps restent mystère
LES VOYAGES
on m'a raconté
la chambre coûteuse
l'hôtel dans la ruelle
les tambours matelassés qui tuent le son
les préparatifs
le loup sur les yeux
la voix tremble
"maintenant il sait qu'il ne l'aime pas"
mange ton mensonge ! éveille ton songe
LES VOYAGES
le plancher de bois sur la ruelle comme en pente_la femme en rouge et l'homme en veste de cuir_ils paraissent juste sortis de la chambre d'hôtel_en dépit de l'heure_ils parlent et mangent un peu_on ne peut pas ne pas les regarder
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je crois bien que la Mort est assise un peu plus loin_dans leur dos_qu'ils ne veulent pas le dire_pas en parler_pourtant la Mort n'est pas moi_peut-être juste dans mon dos à moi si je me retourne
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de toute façon ils tombent dans la Peste et le Choléra l'Histoire les attrape à la nuque_ils n'ont pas choisi d'être jetés là
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d'ailleurs il ne sont même pas un _Ils_ même pas un _Nous_ juste deux feuilles tombées de l'arbre
LES VOYAGES
ils sont deux bien sûr séparés
le verre est invisible il coupe
la chienne chasse hume il est blessé sanglier
pas une meute de chiennes une suffit
les oiseaux chantent à l'oreille
les fourmis, vers de terre et mulots posent une petite caresse
au groin de l'ami dans la forêt épaisse
mais où reste le chasseur où reste le coup de feu ?
LES VOYAGES
dans une autre ville_petite | je vois un couple | la femme grande l'homme petit_comme la ville
¬ Ha ! ça me rappelle ce concert à Bari _moi jeune_ la chanteuse immense et puissante_le ténor _il est son mari_ petit et rablé | le public chuchote et moque ¬
ceux-ci _pas les chanteurs_ on voit qu'ils sont un récit | un mythe_une invention nécessaire_une fiction | le serveur me fait un clin d'oeil | grimaçant son admiration vers leur table_je bande à l'avance de leur malheur
LES VOYAGES
le café était largement vitré mais ça n'aidait pas
les lumières tristes ne projettent pas grand chose vers le boulevard | les sirènes des flics passent au loin ou juste là | ceux-là semblent tout juste sortis _ ou alors partis dans une nuit debout | l'homme raconte interminablement _ on dirait qu'il explique _ elle écoute _ il y a une séparation | je passe lentement enfile un manteau juste dans le dos de l'homme | la voix est passionnée hésitante_"tu le sais bien que je bande pour ta névrose"_
je ne peux pas rester planté là plus long | je vais voir si les flics attaquent république | je réfléchis à ces deux-là comme à l'espoir comme à la démocratie_si les rébellions perdent la force ils seront arrachés_l'un de l'autre_je le sais
LES VOYAGES
l'homme nu
la regarde pisser
il attendit longtemps
nu dans le bar
la voiture qui tardait