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///Des files lentes et lourdes dans ce qui devait être une rue - entre les débris des maisons - et la route n'existe plus - juste une piste écrasée - écrasée comme les corps - tracée par les chars d'assaut - ils regardent de leur œil de cyclope - par les paupières de métal - ceux qui de toute façon vont mourir - les enfants marchent aussi - leurs pieds en sang dans leur souliers - depuis une année qu'ils marchent - si tu restes là on te tue si tu te déplaces on te tue - les files de corps sont partout - ça ne sert à rien de se déplacer - il n'y a pas d'endroit où rester - parfois les files sont des rangées - avec la gueule d'un canon de tank qui les regarde froidement - il semble qu'il y ait un plaisir chez les dominateurs - et les colonisateurs - arrêter le temps sur un instant d'horreur et d'humiliation de l'autre - ce temps suspendu, comme disait le poète, il n'en finit jamais sur la terre des oliviers arrachés.
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///Le journaliste
Il est comme un qui tenterait de jouer du violon. Mais quelqu'un a arraché les cordes du violon. Et l'archet n'a plus de crin, alors il frotte le bois de l'archet contre le bois du violon et ça fait de drôles de bruits. Aujourd'hui sa tête de journaliste a été affichée dans tous les médias occidentaux. Avec écrit dessous "terroriste". Pourtant il est un vrai journaliste. Pas comme les petits blancs luxueux avec leur boîte à outils de mensonges. Alors les petits blancs s'excitent "Oh oui il faut le tuer celui-là, tout de suite ! Oh comme c'est rigolo..." Ils n'aiment pas cette concurrence par la sincérité. Le vrai journaliste, qui n'a pas la peau blanche, il sait qu'il est déjà mort. Il ne va pas tenter de fuir. Il espère que le grincement du bois contre le bois va continuer de s'entendre encore quelques heures ... ou quelques jours s'il a beaucoup de chance.
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///Comment imaginer ?
Comment imaginer ce dans quoi nous sommes en train de tomber ? On sent bien que la tâche est au-dessus de nos forces. Mais il semble que quelque chose peut nous donner une petite idée. Imagine que la dernière guerre se soit terminée par la victoire totale du méchant. Son idéologie aurait alors reformaté les sociétés, de toute l'Europe en tout cas et peut-être du monde entier. Et tous les mensonges seraient devenus des vérités inscrites dans des lois avec des polices illimitées pour forcer l'obéissance. Si les États-Unis, l'OTAN et Israël réussissent à poursuivre leur folie jusque là où il le désirent tant, nous serons dans cette situation. Les pires criminels seront devenus la norme de la vérité de la bonté et de toutes les lois. Comment fait-on pour vivre dans un monde pervers ?
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